Cette innovation est née du besoin urgent de renforcer le vivre-ensemble dans un contexte marqué par la montée des violences, la détérioration du climat scolaire et la fragilisation des liens communautaires. Les écoles comme les quartiers font face à des tensions quotidiennes : conflits entre élèves, harcèlement, comportements à risque, incompréhensions entre jeunes et adultes, mais aussi frustration et exclusion des adolescents qui n’ont plus accès à l’éducation formelle. Ces réalités compromettent non seulement la sécurité, mais aussi les capacités d’apprentissage, de socialisation et de participation citoyenne des jeunes.
Face à ces défis, nous avons conçu une approche innovante visant à outiller les enfants, adolescents et jeunes adultes pour qu’ils deviennent eux-mêmes des acteurs de cohésion sociale. Les Comités de paix implantés dans les écoles servent d’espaces d’écoute, de médiation et de sensibilisation, où les élèves apprennent à gérer pacifiquement les conflits, à dialoguer et à co-construire un environnement sûr et inclusif. En parallèle, les Clubs de paix communautaires offrent aux jeunes non scolarisés une opportunité d’apprentissage informel, d’expression personnelle, de développement de compétences sociales et d’engagement citoyen, afin de réduire leur marginalisation et renforcer leur rôle dans la communauté.
L’innovation vise ainsi à créer une dynamique durable où les jeunes — qu’ils soient scolarisés ou non — acquièrent les compétences socio-émotionnelle
En pratique, l’innovation se traduit par un ensemble structuré d’activités menées directement dans les écoles et les communautés. Dans chaque établissement partenaire, un Comité de paix est créé et composé d’élèves, d’enseignants et d’un point focal scolaire. Ce comité organise régulièrement des séances de médiation entre pairs, des cercles de dialogue, des ateliers de communication non violente et des campagnes de sensibilisation sur le respect, la tolérance et la prévention du harcèlement. Les élèves y apprennent à analyser les conflits, à proposer des solutions et à développer des comportements pacifiques au quotidien.
Dans la communauté, des Clubs de paix sont mis en place pour les adolescents et jeunes qui ne sont pas scolarisés. Ces clubs deviennent des espaces sûrs où ils peuvent se rencontrer, partager leurs expériences, renforcer leurs compétences de vie et s’engager dans des actions collectives telles que des journées de salubrité, des débats publics, des campagnes porte-à-porte, des jeux coopératifs ou des activités artistiques promouvant la paix. Des mentors communautaires sont formés pour suivre et encadrer les jeunes.
L’innovation s’appuie également sur des formations pour enseignants, parents et leaders locaux afin de garantir une cohérence éducative entre l’école, la famille et la communauté. Cette approche intégrée permet de créer un environnement complet où la culture de paix est vécue, pratiquée et transmise au quotidien.
L’innovation s’est propagée de manière progressive et organique, portée par les résultats observés dans les premières écoles et communautés pilotes. Au départ, le programme a été introduit dans un nombre limité d’établissements et de quartiers afin de tester les Comités et Clubs de paix, d’adapter les outils pédagogiques et d’impliquer les acteurs locaux. Les améliorations visibles du climat scolaire, la réduction des conflits entre élèves et la mobilisation des jeunes non scolarisés ont rapidement attiré l’attention d’autres écoles, enseignants, responsables communautaires et associations de jeunesse.
La diffusion s’est renforcée grâce à la formation de jeunes leaders, de pairs éducateurs et d’enseignants référents, capables de reproduire le modèle dans leurs propres milieux. Ces relais locaux ont joué un rôle central dans la sensibilisation, le partage d’expériences et la création de nouveaux Comités et Clubs de paix sans nécessiter de ressources importantes. Les rencontres entre écoles pilotes, les campagnes de sensibilisation et les émissions radios locales ont également contribué à la visibilité du programme.
Par ailleurs, l’appui des autorités éducatives et des structures communautaires a facilité l’intégration des pratiques de médiation et d’éducation à la paix dans d’autres établissements. Ainsi, l’innovation s’est diffusée non seulement par croissance directe, mais aussi par appropriation locale, devenant un modèle facilement reproductible et adapté aux besoins de
Au fil de sa mise en œuvre dans la zone de santé de Kalonge, un territoire longtemps marqué par une myriade de conflits communautaires, armés et familiaux, notre innovation a été modifiée et enrichie pour mieux répondre aux réalités locales. Les premières activités ont révélé la nécessité de renforcer les compétences psychosociales des jeunes, souvent exposés à des traumatismes ou à des tensions persistantes. Nous avons donc intégré des modules spécifiques sur la gestion du stress, l’expression émotionnelle et la résilience. L’implication des leaders coutumiers, confessionnels et des structures locales de résolution des conflits a également été ajoutée afin d’assurer une approche cohérente entre l’école, la communauté et les mécanismes traditionnels de médiation. Les Comités et Clubs de paix ont été adaptés pour inclure des causeries éducatives sur les causes historiques des conflits dans Kalehe et sur les moyens de promouvoir la cohésion entre les groupes. Nous avons enrichi les outils pédagogiques avec des jeux coopératifs, des activités culturelles et des témoignages de survivants ou médiateurs locaux, afin de rendre les séances plus ancrées dans l’expérience des jeunes. De même, un mécanisme de suivi plus participatif a été mis en place, permettant aux jeunes de documenter eux-mêmes les petits changements observés dans leur environnement.
Ces ajustements ont permis de rendre l’innovation plus sensible au contexte, plus inclusive et mieux alignée avec les besoins.
Pour essayer cette innovation, il vous suffit de suivre quelques étapes simples et adaptées à n’importe quel contexte scolaire ou communautaire. La première étape consiste à identifier une école, un groupe de jeunes ou une communauté motivée à promouvoir la paix. Une petite équipe locale doit ensuite être constituée : un enseignant référent, quelques jeunes engagés, un leader communautaire ou un agent local accompagnateur. Cette équipe jouera le rôle de noyau initiateur.
Nous vous fournirons un guide méthodologique et un kit d’outils pratiques comprenant des modules de formation, des fiches d’activités, un manuel de médiation entre pairs et des exercices de communication non violente. Ces ressources vous permettront de lancer facilement un Comité de paix à l’école ou un Club de paix dans la communauté, même avec peu de moyens.
La deuxième étape consiste à organiser une séance de sensibilisation pour présenter l’objectif du Comité/Club, identifier les membres fondateurs et définir ensemble les premières activités. Les jeunes peuvent commencer avec des séances simples : cercles de parole, activités coopératives, actions de sensibilisation ou discussions guidées sur les sources de conflits dans leur milieu. Dans un contexte comme celui de Kalonge, il est fortement recommandé d’impliquer également les parents, les leaders coutumiers et les responsables communautaires pour renforcer l’acceptation et la durabilité. Enfin, il suffit de documenter régulièrement les progrès.